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Une histoire d’ingénierie pédagogique hybride – partie 1

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Image de pièces de puzzle colorées mélangées utilisée comme métaphore de l'ingénierie pédagogique dans le texte.

C’est l’histoire d’une ingénierie pédagogique hybride : de la conception d’une formation entière au développement du module d’e learning qui en est l’une des étapes.

C’est un projet captivant auquel j’ai contribué. Pourtant je ne vais pas parler ici du sujet de la formation. Pourquoi ? Parce que j’ai envie de vous parler de mon travail ! Si je brouille le message avec la thématique de la formation, je sais que vous, lecteurs et lectrices, allez être totalement intrigué·e·s et parfaitement déconcentré·e·s par rapport au sujet du jour. Alors c’est non, désolée pour votre frustration ! Ici je vais retracer les étapes de mon travail pour le rendre perceptible.

En revanche, pour satisfaire votre curiosité insatiable, je vous donne rdv le mois prochain pour un article complémentaire où j’aborderai le sujet de ce projet ! Et comme le projet dans son ensemble est très long à décrire, nous nous retrouverons dans deux mois pour sa suite.

Reprenons : c’est donc l’histoire d’une ingénierie pédagogique hybride. Elle se déroule en sept étapes, du cahier des charges (ne grimacez pas, ça va bien se passer) à l’analyse de la satisfaction.

Première étape de l’ingénierie pédagogique : le cahier des charges

Tout commence toujours par un cahier des charges dans lequel il s’agit de se glisser. Il est rare que ce costume nous aille comme un gant.

Il est souvent trop étriqué : trop contraignant, il sera difficile d’y faire émerger de la créativité. Dans ces cas-là tout est serré, à commencé par le budget et il faudra faire avec, ou plutôt sans.

Le cahier des charges est parfois comme un costume trop grand. C’est rare, mais cela arrive. Dans ces cas-là, on flotte dedans ! Et c’est à nous d’affiner un peu les choses, de préciser les contours, les lignes directrices.

C’était un peu le cas du projet dont je vous parle. Mon client avait une intuition très forte qui le poussait à la conviction qu’une formation était nécessaire. J’avais une ligne directrice principale : inventer quelque chose qui n’existe pas. Nulle part. Cela impliquait zéro référentiel métier, pas de cadre légal, pas d’objectifs déjà formulés. J’avais un public cible. Et deux autres indications : un volume horaire à la louche et des modalités puisque mon client voulait profiter de cette opportunité pour créer une formation hybride.

Vous trouvez ça flou ? Moi aussi et c’est ça que j’aime dans mon métier ! À partir de là, il y avait tellement de choses à imaginer… Cela commence avec l’analyse du besoin de formation.

Deuxième étape : l’analyse du besoin de formation

Puisque le public cible était défini, il s’agissait en premier lieu d’aller vérifier l’intuition de mon client. J’ai donc commencé par remonter à la source. J’ai questionné des formateur·rice·s intervenant·e·s sur les formations initiales de ce public cible. Ce fut révélateur : mon client avait raison. En formation initiale, aucun module, aucune heure de formation n’était dédié à notre sujet.

Pour affiner un peu cette intuition, j’ai souhaité délimiter la curiosité des personnes concernées. Oui, c’est un peu particulier comme manière de dire. On parle toujours d’ « analyse du besoin » et dit comme ça, ça ne fait rêver personne. Mais comme il s’agit de concevoir une formation, souvenez-vous : adulte, on se forme mieux lorsque l’on a de l’intérêt pour le sujet de la formation et que l’on visualise qu’elle va servir à quelque chose… Je crois donc qu’il s’agit d’une curiosité. Elle est un levier d’apprentissage. En délimiter les contours, c’est mieux ajuster la formation à ce fameux « besoin de formation ».

J’ai donc conçu un questionnaire en ligne adressé directement au public cible.

Ici une erreur grossière : le public cible est difficile à toucher par ce biais. Mon client a complété les quelques réponses recueillies par des entretiens qualitatifs, le questionnaire à l’appui.

Quelque soit le petit nombre de réponses recueillies, le besoin de formation prenait une forme certaine. Les participant·e·s formulaient des questions précises qui mettaient bien en évidence leur curiosité. Non seulement l’intuition première était confirmée mais mon cahier des charges était un peu plus clair.

Troisième étape de l’ingénierie pédagogique : la formulation des objectifs

Armée des réponses au questionnaire, j’ai pu réaliser un travail de synthèse. Ce qui suit est difficile à décrire. Pour être tout à fait honnête j’ai l’impression d’une tempête de cerveau, littéralement. Une fois le vent calmé, je secoue tout ça une dernière fois et les pièces du puzzle se mettent en place. Hum, ça ne vous aide pas à comprendre ce que je fais ? OK, je reprends.

J’ai beaucoup lu les réponses du questionnaire. Pour rien, pour être sûre, pour commencer à imaginer la synthèse, pour la mettre en forme. À force des mots clefs émergent, je vois des récurrences, des ressemblances. J’essaie de reformuler les idées principales. Elles parlent de difficultés rencontrées sur le terrain mais aussi de ce qui aide à les résoudre.

Je liste ces difficultés. Je liste aussi ce qui aide : j’y vois des choses qui pourraient être accentuées, encouragées, facilitées par le biais de la formation. Du besoin d’apprendre, je peux commencer à formuler des réponses. Dans ma tête cela ressemble à : « ils·elles veulent comprendre pourquoi l’herbe est verte, il faudra qu’on parle de la chlorophylle ». (Oui cet exemple est un piège : non, la formation ne parle pas d’herbe, ni d’aucun végétal. Quoique… !) Et ainsi de suite…

Cela me permet de formuler des intentions pédagogiques. Cela ressemble à « Proposer une information complète sur les possibilités, réglementations et actes (…) » (non, je ne vous en dirais pas plus !!).

Je passe assez vite des intentions aux objectifs pédagogiques : « il faudra qu’on parle de la chlorophylle, parce que nous visons la capacité à reformuler les phénomènes biologiques à l’origine des couleurs végétales ». Je finis ainsi par avoir une liste de d’objectifs pédagogiques. C’est alors qu’il m’est possible d’imaginer la formation concrètement.

Quatrième étape : la scénarisation pédagogique

Pour scénariser la formation, je reprends chacun des objectifs pédagogiques. Pour chacun d’eux, je me demande par quelles étapes il faut passer pour qu’il soit atteint. Par exemple pour un objectif qui vise la capacité à répertorier les étapes d’un processus, il faut que les apprenant·e·s dressent la liste des étapes et manipulent suffisamment cette liste pour réussir à mettre les étapes dans l’ordre.

J’essaie donc d’imaginer quelles activités de formation vont permettre de réaliser ces étapes. Est-ce que c’est par une prise d’informations, quel que soit le support ? est-ce que c’est par une discussion de groupe ? Un exercice de groupe ? Des apports du·de la formateur·rice ? Un jeu ? Une mise en situation ?

J’abouti donc à une liste d’activités possibles pour chaque objectif pédagogique. Ensuite il s’agit d’organiser tout cela de manière cohérente. Je réfléchis selon deux critères : 1° mettre en œuvre une progressivité de la formation pour partir de la curiosité naturelle des apprenant·e·s, 2° varier les activités pour que les moments d’écoute puissent être suivis par des moments avec une plus grande implication. À ce stade-là des choses, de nouveau l’image du puzzle est parlante pour moi. J’ai en effet à ma disposition plusieurs pièces. Il me faut les organiser pour que l’ensemble ait du sens, une progressivité pédagogique et une variété dans l’implication requise.

Lorsque le puzzle est reconstitué, il est alors possible d’entrer dans les détails de chaque séquence. J’arrive là dans le déroulé pédagogique à proprement parler : à quelle heure ? qui fait quoi ? avec quel matériel ?

Mais…

C’est fou ce que c’est long une ingénierie pédagogique complète ! Et si nous nous arrêtions là pour ce mois-ci ?

Je vous donne rdv dans un mois pour la suite de cette histoire !